365 DNI : pourquoi je soutiens ce film ?
Connaissez-vous ce nouveau film sur la plateforme Netflix qui fait tant polémique : 365 Dni ?
C’est lorsque j’en ai entendu parler sur les réseaux sociaux que j’ai découvert ce film. Curieuse de savoir ce qu’il en retournait, je décidais de m’en faire une idée par moi-même. J’ai regardé le film et j’ai écouté toutes les critiques, beaucoup de mauvaises d’ailleurs. Au sein de la communauté BDSM d’une part et du côté des féministes d’autre part, pour des raisons bien différentes.
Les personnages centraux
Massimo, un bel homme, ou disons plutôt un homme qui répond à un « standard » masculin, qui a été choisi bien évidemment pour plaire au plus grand nombre de femmes. Pas toutes les femmes, assurément, puisque c’est un peu le nerf de la guerre dans la polémique qu’à fait naître ce film.
Cet homme, l’incarnation même du cliché qui fonctionne {pour certaines, une fois encore, pas de généralités} : L’italien au regard ténébreux, le muscle saillant, au sang chaud, viril, charismatique, voyou sur les bords (mais avec classe dirons-nous) qui sait ce qu’il veut et qui est peté de thune, évidemment. J’oserais dire un Christian Grey amélioré, car ce supplément voyou est là pour donner ce petit goût de flirt avec le côté sombre de la force, qui, me semble-t-il, plaît aux femmes. Celles qui cherchent le frisson, celui qu’elles n’ont pas trouvé dans 50 nuances de Grey par exemple, celles qui ont été déçues par l’adaptation cinématographique de la trilogie jugée trop « fade » en qui elle avaient mis pourtant beaucoup d’espoir. Ici, c’est un peu différent, la tension monte d’un cran et les scènes gagnent en « trashitude », créant par la même occasion une vive polémique.
C’est là tout le paradoxe que ce film met en lumière, celui de la femme d’aujourd’hui, celui qui nous, les femmes, nous divisent, malheureusement… Mais ça, je vous en parlerai en détail plus tard.
En face, la demoiselle, dont je n’ai même pas le nom, est une jeune femme dans le vent, physiquement parfaite (aux yeux des standards de beauté une fois encore), mal aimée et insatisfaite sexuellement. Une femme téméraire et qui n’a pas froid aux yeux. Le bon cocktail qui permet au film de laisser l’opportunité à son auditoire cible de s’identifier à elle. Les femmes en manque d’amour fou et de grand frisson, celles qui rêvent secrètement et honteusement (merci le féminisme) d’être prise sauvagement et sans ménagement, sans leur consentement peut-être même. Une femme d’aujourd’hui, une femme libre et insoumise en quête d’intensité, qui rêve secrètement d’être matée malgré l’image tout à fait contraire qu’elle peut bien renvoyer d’elle-même.
Le pitch
Vous l’aurez bien compris, ce film-là est une version légèrement plus osée et aboutie, sur le plan sexuel, j’entends, que le film 50 nuances de Grey, bien loin du BDSM comme il l’est dans la réalité, loin de toute réalité tout court d’ailleurs. Je pense bien que les chefs de cartel de drogue n’ont pas la même fibre « romantique » que Massimo si je puis dire ainsi.
Ce film est une romance. Il caractérise un fantasme et renvoie une image parfaite du cliché qu’il dépeint. Pour vous la faire courte, c’est l’histoire d’un homme riche, beau et dominant qui trouve la femme de ses rêves, la fait captive dans un somptueux et magnifique château pour la satisfaire sentimentalement, sexuellement et financièrement.
Quand beaucoup de féministes s’offusquent en parlant d’une apologie à la domination masculine, moi, je vois dans ce film pourtant tout l’inverse. C’est, si l’on y regarde bien, l’histoire d’un homme complètement soumis à ses désirs et ses pulsions qui se dit être prêt à tout pour gagner le cœur de sa promise, jusqu’à même changer son comportement vis-à-vis d’elle. Alors que certaines parlent de soumission féminine, culture du viol, sexualité non consentie, la communauté BDSM et moi-même voyons plutôt une femme qui sait tout le pouvoir qu’elle a sur un homme totalement épris d’elle, qui ne se donne que lorsqu’elle le désire et qui n’hésite d’ailleurs pas à manipuler cet homme. Pas si dominant que ça, finalement ? (Alors Messieurs, personne ne fait polémique ? Que les hommes se rebellent et crient au nom du masculinisme au scandale ! *rire*)
Concernant tout le versant qualitatif de ce film, je serais courte, car d’une part je ne serais pas très élogieuse et d’autre part, je n’ai pas grand-chose à dire. Pour moi, les discours sont pauvres, le scénario l’est tout autant. Le film est assez lisse du début jusqu’à la fin. Tout est parfait, rien ne dépasse, c’est tellement romancé que s’en est presque caricatural. Bref.
À dire vrai, si vous voulez mon avis, je n’ai pas trouvé le film désagréable pour autant. Bon, il faut dire que ma position me place un peu hors compétition si je puis dire, n’étant ni féministe, ni une femme qui fantasme sur ce genre de romance BDSM tout public. Alors, comment dirais-je… J’ai trouvé ce film rafraîchissant et un peu osée pour ce que nous, les pratiquants BDSM nommons le « vanille ».
Si j’ai aimé ce film, c’est surtout pour les quelques scènes de cul, plus particulièrement les scènes de tension sexuelle. Je dirais me concernant que c’est un bon divertissement. Un préliminaire cinématographique avant de passer sur Kink.com par exemple. Même si je pratique des choses sexuellement beaucoup plus extrêmes en comparaison, beaucoup plus sado-maso et beaucoup plus humiliantes, j’ai été séduite par les quelques passages assez cérébraux et spontanés de la pipe « non consenti » de l’hôtesse dans l’avion par exemple, des mains portées au cou, des menaces sexuelles chuchottées à l’oreille, etc. Après, effectivement, je me suis vite senti frustrée, restée sur ma faim, car c’était très pondéré et finalement très vanille malgré tout. En même temps, c’est normal, ce film n’a pour moi rien de concrètement BDSM, et il ne cherche d’ailleurs pas à satisfaire ma catégorie de spectateur, mais surtout la femme « standard » qui, comme je l’ai déjà dit, cherche du frisson et un peu d’évasion. C’est une version très édulcorée et romancée de ce que bon nombre de femmes se représentent lorsqu’elles s’imaginent leurs fantasmes « BDSM » les plus fous. D’ailleurs, c’est très bien réalisé sur ce plan, les scènes sont belles, excitantes, elles donnent envie. Massimo lui-même donne envie, son regard peux donner envie, son attitude, sa façon d’être, etc. C’est, quoi que certaines puissent en dire, un fantasme que beaucoup de femme partagent et qui fait mouiller bien des culottes.
Pourquoi l’auditoire féminin se divise autant avec ce film ?
Pour deux choses très simples selon moi : parce que globalement, nous avons des désirs différents d’une femme à une autre et que par ailleurs, nous n’acceptons pas que d’autres puissent penser différemment.
Je m’explique…
Nous pourrions globalement diviser les femmes en deux parties vis-à-vis de ce film. Celle qui sont anti et celle qui sont pro. Les anti s’indignent et pensent que ce film fait l’apologie de beaucoup de choses inacceptables : la domination masculine et les rapports non consentis sans admettre une seule seconde que certaines femmes puissent fantasmer à ce sujet. Aussi, elles mélangent un peu tout. Être excitée de voir une femme se faire prendre de force ne veux pas dire qu’elles désirent que cela leur arrive pour autant. Cela ne veut pas dire non plus que ce sont des femmes qui aimeraient se faire violer un jour.
À l’opposé, il y a les femmes qui aiment ce film. Des femmes qui vibrent en voyant cet homme et tout ce qu’il représente de sexuel. Des femmes qui apprécierait, peut-être, à des degrés tout à fait différents les unes des autres vivre quelque chose qui y ressemble. Se faire aborder par des hommes parfaitement beaux et de se voir traitées comme des reines tout en étant esclave de leurs désirs sexuels.
Au passage, j’aimerais en profiter, car c’est totalement le propos. J’aimerais jeter un pavé dans la mare. Oui, dire merci, car merci, merci le féminisme de vouloir nous libérer des diktats de la société. Mais merci surtout d’agir en héros, en guerrières, en libératrices et de parler au nom de toutes les femmes, même celles qui ne souhaitent pas que vous les représentiez, en pensant que toutes les femmes pensent comme vous. Merci aux féministes d’avoir réussi à créer d’autres diktats, les parfaits opposés (comme si il s’agissait de se livrer une guéguerre et de riposter contre le patriarcat) En niant totalement les désirs pourtant très forts de certaines femmes que le féminisme n’accepte pas d’entendre. Les rendant, de ce fait, plus honteuses encore, plus effacées et moins soutenues.
Car oui, les femmes ont parfois honte d’apprécier des films comme celui, et non pas aux yeux des hommes, mais surtout parce que cela, pour elles, va en inadéquation vis-à-vis de leurs principes féministes ; parce que le féminisme juge, et qu’il leur bourre dans le crâne qu’être soumise, c’est être faible ! Et c’est une honte, qu’il ne faut pas.
Des désirs que le féminisme juge en remettant la faute sur le patriarcat. Nous faire croire que c’est la société qui nous a mis ça dans le crâne au fil du temps et que nous devons urgemment déconstruire cela. Et s’il n’en était rien ? Et si c’était, pour certaines femmes (pas toutes évidemment, peut-être même une minorité) un désir né de la femme et d’elle uniquement, qu’elle désire cette place de soumise que personne ne lui impose ? Le féminisme serait désœuvré d’imaginer cela une seule seconde, et pourtant, c’est la réalité. Étant capable de dire qu’on a été si bien « éduquées » qu’on en est venues à aimer ça malgré nous-même, sans s’en rendre compte. C’est faux ! Si je ne suis pas féministe à ce jour, c’est bien pour ça. Car si je suis féministe au fond de moi, alors je le suis tellement différemment que celui qui fait loi aujourd’hui.
En tant que femme soumise, j’ai l’impression qu’il y a une volonté pour le féminisme de fermer les yeux sur cette partie (non négligeable) de femmes qui aime cela et de cultiver une certaine forme de culpabilité vis-à-vis d’elles. Est-ce ça le féminisme ? Je croyais que les femmes étaient libres sexuellement, d’être ok où de n’être pas ok avec l’envie d’avoir des rapports, avec la drague de rue, avec telle ou telle pratique sexuelle, alors que finalement on se rend rapidement compte qu’on n’a pas le « droit » de désirer bien des choses.
Aussi, j’aimerais apporter une nuance (de Grey 😉) ; tous les désirs sont acceptables et tous sont respectables, simplement, le passage à l’acte, c’est différent. On peut désirer très fort quelque chose sans vouloir pour autant le vivre. Car nous touchons là à des jeux sexuels qui flirtent avec les limites. C’est d’ailleurs parfois ça qui rend la chose excitante.
Oui, désirer se soumettre, désirer ne pas désirer, désirer se faire abuser, cela existe. Et pour beaucoup de femmes même, plus qu’on ne l’imagine en tout cas. Le succès fulgurant de ce film en est d’ailleurs la preuve irréfutable. Il est écrit par une femme pour les femmes, c’est important de le dire aussi. Tout comme 50 nuances de Grey d’ailleurs.
Alors, effectivement, ce film créé la polémique, c’est tout à fait normal, mais chaque ressenti à son sujet se respecte. C’est pourquoi les féministes et les ultras m’ont toujours chagrinée car on a le sentiment qu’il faut penser comme elles et ne pas accepter des films comme celui-ci par exemple, tout en niant qu’il a fait naître beaucoup de désir pour énormément de femmes et que ce film aussi polémique puisse t’il être, a su ravir et satisfaire beaucoup d’entre nous, sans pour autant que nous soyons des femmes qui rêvent de se faire violer par des inconnus à chaque coin de rue.
Le souci aujourd’hui, et je le répète, c’est le paradoxe. Comment en 2020, nous pouvons parler librement de sexe tout en assumant toutes nos différences, prôner notre ouverture d’esprit sans faille quant aux sexualités dites « alternatives », en bref tout ce qui sort de la monogamie hétérosexuelle tout en acceptant pas qu’on puisse fantasmer sur un film tel que 365dni ?