N’est pas Maître qui veut

Voilà un moment que je n’ai pas écrit, et pour cause, je traverse une période assez douloureuse d’une prise de conscience à la fois générale et totalement personnelle.


Après des jours de recherches, des années d’attentes et des milliers de discussions stériles, je pense avoir l’expérience malheureuse en ce qui concerne la recherche d’un Maître.


J’ai eu beau écrire des articles entiers à ce sujet, avoir voulu éclaircir toutes ses zones d’ombre sur lesquelles hommes et femmes se confrontent dans leurs quêtes du bonheur, dans leurs quêtes de domination ou de soumission, ma prise de position s’oriente enfin. Soit. Ces articles ont été lus et relus et ils ont eu un succès que je n’osais même espérer, j’en ai vite été assez fière. Cependant, j’ai compris quelque chose de fondamental au-delà de tout ça : lorsque l’on n’est pas une soumise, alors on ne le deviendra jamais, et au même titre, lorsque l’on n’est pas un Maître, on ne le deviendra jamais.


Il ne suffit pas de se réveiller un beau jour et de se dire « tiens, aujourd’hui, ça me tentera bien de soumettre une femme » ou « tiens, je me ferais bien soumise pour voir »

Je suis de plus en plus convaincue que ses choses-là sont en soi, qu’elles ne naissent pas d’une mode romantique, d’un courant populaire, ni d’un besoin éphémère et ponctuel. Se soumettre, c’est un véritable engagement, un engagement envers soi, mais surtout envers l’autre. Au même titre, dominer, c’est une façon d’être, un véritable trait de caractère, mais aussi, et surtout, une philosophie de vie complète et réfléchie.


Trop d’hommes se plaisent à diriger une femme et à en faire leurs objets sexuels, car ils refoulent très certainement dans leurs couples vanille des désirs qu’ils ne peuvent assouvir, c’est pourquoi beaucoup se cachent derrière des relations extra-conjugales BDSM en prétextant qu’ils sont Maître. Mais Maître de qui ? De quoi ? Car l’on est Maître seulement au travers du regard de l’autre.


Beaucoup d’hommes m’écrivent en énonçant des années de BDSM. En creusant un peu, ce n’est que des relations ultras ponctuelles, mensuelles/bimensuelles, purement sexuelles et bien trop peu sentimentales. Des relations nourries par une soif charnelle au-delà du lien cérébrale et émotionnel qu’induit ce type de relations. Quel homme Dominant ici est il capable d’abandonner son confort vanille pour honorer et valoriser sa soumise qui elle, très souvent, sous le sceau de l’égoïsme et de la jalousie, vit esseulée et captive d’une solitude sentimentale et sociale parfois terrible à vivre. Lui, n’a qu’a ordonner, en retourner à son petit bonheur familial. C’est tellement facile…


Et ça malheureusement, tristement, les femmes l’acceptent, sans rechigner, car c’est inscrit ainsi : accepter, c’est se soumettre, et c’est le sacrifice à subir pour obtenir un semblant de relation BDSM.


J’ai été franchement dégoûtée avec le temps, la lassitude et la répétition perpétuelle des mêmes situations, de voir en face de moi toujours le même profil ; relation souhaitée purement sexuelle, désengagement relationnel, l’éducation reste un terme bien flou qui fait simplement joli sur le CV, car l’on n’y met rien ou presque rien comme concept fort derrière.

L’homme dominant qui fait reposer son éducation sur les coups de trique et des restrictions d’orgasmes n’a selon moi strictement rien compris. Pourtant… Même si cela semble évident, combien d’hommes qui se disent Maître et pensent ainsi !

Être Maître, c’est avant tout une grande responsabilité, un rôle plus qu’important et très compliqué à mener, je le sais, j’en ai bien conscience. C’est beaucoup d’engagement, un esprit réfléchi, mature et très critique, qui prône la pédagogie et la transparence. Un homme qui aura plus à cœur d’introduire la confiance dans son lien vis-à-vis de sa soumise plutôt que de la faire jouir comme une chienne.


Beaucoup s’imaginent qu’être Maître, c’est le bonheur facile, les femmes prête à tout au moindre claquement de doigts, et de faire ce constat, ça me fait mal… Ils pensent qu’être Maître s’est se poser et se laisser servir, contenter et choyer sans devoir faire quoi que se soit. Alors que c’est tellement faux….


Après, mon avis à ce sujet ne regarde que moi, c’est ce que je pense au plus profond de mon âme de soumise, car le vrai Maître, à mes yeux, je l’ai déjà connu.


Je sais que c’est dur d’être Maître, mais c’est tout aussi dur que plaisant pour celui qui en à réellement les épaules. C’est quelqu’un qui aura toujours les mots justes, les mots sincères sans qu’ils ne soient blessant. Un Maître, c’est un homme qui prend soin de sa soumise, car il s’en sent réellement responsable, c’est un homme qui ne laissera jamais faner sa belle, car il s’en inquiète, apprend à la connaître, communique avec elle et cherche constamment à la faire baigner dans un climat de confiance.


Me concernant, je ne sais pas me soumettre autrement que dans cette mouvance-là. Certaines le font peut-être, par choix, par désir, ou certainement par dépit, mais moi, je ne peux pas. Je n’arrive pas à vouvoyer quelqu’un qui me rejette, je n’arrive pas à me donner à quelqu’un en qui je n’ai aucune confiance.


Ainsi, comment est-il possible ensuite d’imposer la soumission à une femme qui n’est pas en accord avec elle-même, car on ne le lui donne pas les cartes nécessaires pour s’ouvrir et s’épanouir ?

Je me suis d’abord cru précieuse et difficile, du fait, j’ai accepté de faire des « concessions », d’accepter une certaine forme d’incompétence en imaginant que j’avais des attentes trop prétentieuses. Mais, le constat est fait, et tout est limpide : il est inutile de se construire sur une relation sans base, avec quelqu’un qui n’est pas sur le même parcours que vous.


Tout ça pour passer un petit message, pacifique mais fondamental. Trop de femmes souffrent en silence et trop d’hommes détruisent sans même s’en rendre compte, certain même ironisent en niant la douleur de l’autre et je trouve ça terrible. Me concernant j’en ai marre de souffrir, et je souhaite vous exprimer là mon ressenti propre pour éveiller un peu les consciences.


Je crois que de vulgariser le BDSM, c’est une bonne chose, mais de se vulgariser soit, ça ne l’est pas. Je persiste et signe aujourd’hui pour dire que n’est pas Maître qui veut, et que la domination n’est pas qu’une histoire de sexe ou de fétichisme. Pour moi en tout cas, ce n’est ni un jeu, ni une pratique de 5 à 7, et aujourd’hui, je peux affirmer qu’à trop souffrir, je préfère être libre que d’avoir à brader ma soumission pour des hommes qui n’en ont finalement aucun respect.


Se soumettre, c’est un acte tellement fort et tellement noble dont beaucoup d’hommes ne sont pas à la hauteur pour le recevoir dignement. Non pas que les rôles s’inversent, mais que l’importance est de taille. Qu’il soit question de relations fortes et pas de simple plan cul un peu trash, en tout cas, mon BDSM à moi ce n’est pas ça.

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