Les cordes

Après avoir découvert les cordes brièvement lors de ma dernière rencontre avec XX et XY, j’étais désireuse d’en vivre davantage. Les cordes m’ont laissé un souvenir si étrange, si attirant. J’étais comme hypnotisée, chaque nuit, je me rêvais ligotée et contrainte entre de longues cordes de chanvre. Cet art pour lequel je n’avais pas la moindre accroche à l’origine sauf ma curiosité était loin de me faire croire qu’un jour j’en deviendrai accro.

Après avoir vécu ma première expérience, quelque peu troublée, je relisais mon article sur la contrainte et son pouvoir de libération. Je suis étonnée de voir qu’aujourd’hui plus encore que le jour où j’ai rédigé cet article, je suis totalement d’accord avec celui-ci. Je crois que tout réside là, car ce qui me plaît le plus je crois n’est ni dans l’aspect esthétique, ni dans la performance physique et technique, mais surtout dans tout ce à quoi cet acte renvoi : le lâché prise, la contrainte, la délégation du pouvoir, le don de soi, de son corps. Tout ça rien qu’à l’écrire me fait rêver, d’autant plus qu’aujourd’hui, j’ai beaucoup changé… J’ai vécu d’autres expériences et j’ai émancipé la soumise que je suis. Je me retrouve dans les cordes, je me réconcilie avec mes racines les plus fortes et ancrés, et je suis convaincue qu’elles deviendront très certainement ma thérapie vers la liberté, la restauration de mon désir sexuel et cérébral.

Mon récit n’est pas, je le suppose, quelque chose qui pourrait sortir de la bouche de tous les encordés. Mon approche est très personnelle aux vues de ma situation psychologique et de ma disposition émotionnelle à les recevoir. Ce que je vis dans les cordes est fabuleux, j’ai tout mis en œuvre pour cela et aujourd’hui une nouvelle fois, c’est une porte qui s’ouvre devant moi et je compte bien saisir pleinement cette occasion.

J’ai choisi mon partenaire avec intelligence… Nous avions déjà discuté un peu lui et moi pour une séance à trois avec mon Maître, ce qui finalement ne s’est jamais réalisé. Il m’a été conseillé à plusieurs reprises et j’étais prête à lui remettre toute ma confiance. Car il n’est pas simple pour moi d’accorder celle-ci à un tiers, face au personnage que je pourrais représenter pour la communauté. Cette personne n’avait aucun préjugé à mon sujet, il m’a toujours considéré comme une femme ordinaire, non pas un personnage idolâtré ou fantasmé. Cela reste ma condition absolue : je ne rencontre pour ces choses-là que des gens qui ne me placent pas sur un piédestal, je n’aime pas vraiment ça. De mon côté, j’ai tâché de ne pas me laisser dépasser par mon engouement et mon impatience surtout, même si j’avais hâte de le rencontrer.

Jusqu’au jour où nous avions convenu d’une date. L’oreille attentive, intéressée, sincère et compréhensive de cet homme m’a permis de lui témoigner mon envie et mon désir au sujet des cordes. Je ne souhaitais pas autre chose que de me laisser aller au pouvoir de celles-ci, rien de sexuel, rien d’esthétique : que du lâcher prise. La personne que je m’apprêtais à rencontrer était simplement parfaite pour ça. Je voulais mettre toutes les chances de mon côté pour vivre la plus belle des premières fois qu’il me soit possible de vivre dans ce que l’on appelle m’a-t-il dit « le kinbaku ».

Je le découvrais par la même occasion : le kinbaku est l’art des cordes, mais avec tout ce que cela sous-entend de lien entre encordeur et encordé, de communication des corps, de rapport tactile et disons… spirituel. C’est assez dingue sorti de ma bouche puisque je ne suis vraiment pas une fille calée « tantra » et autre sciences à l’odeur de patchouli, mais là, je m’en suis quand même beaucoup rapproché.

C’est totalement ça, je vois le kinbaku dans le BDSM comme le tantrisme l’est au monde vanille.

Alors voilà, le jour J est très vite arrivé ! À mon plus grand plaisir ! J’étais impatiente, et toujours un peu nerveuse malgré tout. Je réservais dans le plus bel hôtel qui m’était possible de réserver, car quitte à être ligotée au sol autant le faire sur de la belle moquette.


Il m’a proposé de boire un café et de discuter un peu avant toute choses. L’impatiente que je suis n’en a pas vraiment trouvé l’utilité, mais la fille cérébrale par ailleurs trouvait ça fondamental, lui était du même avis. Nous avons ainsi fait connaissance tous les deux, nous nous sommes mis au courant des quelques petites choses à savoir avant d’entamer quoi que ce soit. Et après une bonne heure de parlote que ni lui ni moi n’avons senti s’écouler, nous passions aux choses sérieuses !

L’œil pétillant, je passais avec lui le pas de la porte de la chambre, avant de me mettre en condition. Je devais porter le minimum de vêtements possible où alors des choses près du corps pour pouvoir mener à bien cette première fois dans les cordes. Je décidais de favoriser un maximum le contact corde à peau et ne gardais que ma petite culotte sur moi. 

J’inspirais, droite, presque nue, au centre de la pièce et me laissais de cette façon mon corps et mon esprit tout disposé et offert à recevoir ce moment avec beaucoup d’attention. Il s’est approché de moi avec un foulard, je compris alors que mes yeux allaient être bandé ; parfait ! Je pense que ça va décupler mes sensations, c’est une très bonne idée.


Une fois le bandeau en place, je le sens passer ses mains sur mes épaules pour me serrer dans ses bras. C’est très déstabilisant, mon corps est nu et je ne suis pas du genre « grande accolades sensuelle et tendre avec de parfait inconnus ». Je ne sais pas quoi faire de mes deux bras que je place finalement jointes dans mon dos.


Son accolade douce se termine, et sans que je m’en rende vraiment compte, il y a déjà une corde autour de moi, juste sous ma poitrine. Mon souffle et court, le corps en alerte, hyper réceptif. Il tourne autour de moi et avec la plus grande des douceurs, des délicatesses, il noue au fur et à mesure ses cordes sur moi. Il ponctue ses gestes parfois par de vifs serrages de cordes. Tout n’est que douceur et ces petits mouvements volontairement brusques me surprennent à chaque fois, je pousse de courts gémissements qui traduisent un effet de surprise mêlé à une drôle sensation d’excitation.


J’ai le sentiment que les cordes m’enveloppent petit à petit et de plus en plus, elles me contiennent et me renvoient à moi-même. Je prends conscience de chacune des parcelles de mon corps sur lesquelles il pose une corde, je sens ses doigts délicats, la douceur du geste et la fermeté des cordes qui m’enlacent. C’est un superbe moment de communion avec moi-même, assez déroutant, délicieux ! L’art que ce Monsieur pratique sur moi est une belle médiation sensorielle entre nous, je trouve ça vraiment très beau, et j’avoue bien volontiers que je ne m’attendais pas du tout à ça.


Très rapidement, mon buste est tout encordé. D’une parole presque chuchotée, je suis invitée à me mettre à genou. Ses mains bienveillantes sur mes bras, il m’accompagne. Il s’applique désormais à me lier les jambes et les avant-bras. Je me retrouve bientôt dans l’impossibilité de bouger quoi que ce soit. Cette fois, je me demande bien ce qu’il va faire de moi…


D’une mains prise dans les cordes nouées dans mon dos, Il me fait basculer sur le côté, et moi, impuissante, je me laisse tomber pour finir allongée au sol.


La suite n’a été qu’accumulations de nouvelles positions, de cordes, de confessions, de rires et de discussions plus ou moins intimes entre nous deux. Car il n’y a pas à discuter là-dessus : les cordes, ça rapproche. Je pense qu’il est possible de laisser la distance qu’on veut dans ce genre de pratique, à la hauteur de nos envies, de nos possibilités aussi. Cela s’apparente un peu au sexe : au plus l’on se donne, au plus c’est intense, plus le voyage est grand. Pour l’heure, je suis restée modérée et pudique, même si l’envie est si forte que je ne demande qu’aux rencontres suivantes de m’apporter les possibilités de me donner davantage aux cordes, de lâcher prise, etc.


Aujourd’hui, je suis seule et bien disposée à partager sans concession tout ce qu’il me plaira de partager avec ceux pour qui j’ai envie de donner un peu de ma personne, et les cordes sont pour moi une promesse merveilleuse à ce sujet. Je pense avoir rencontré quelqu’un de parfait pour cela aussi ;)


Je songe aux couples amoureux qui pratiquent ce genre d’art qu’est celui du shibari, que l’on soit BDSM ou non, j’imagine que le voyage doit toujours être d’envergure ; fabuleux. Je ne perds pas encore cette fois ce petit pincement au cœur à songer à ce qu’aurait été ce moment si nous l’avions vécu tous les deux mon Maître et moi… Passion, partage, communion… Soit, je balaie assez vite cette pensée mélancolique.


Le temps file à une vitesse folle dans les cordes, et nous aurons passé presque quatre heures dans cette chambre d’hôtel. J’en garde aujourd’hui un souvenir vraiment très agréable, délicieux de cette après-midi. Cette première fois aura été pour moi un moment assez magique, qui m’a donné un goût certain pour les cordes.


J’ai gardé avec moi le souvenir personnel de cette belle après-midi et je me suis fait la promesse de recommencer très vite. L’odeur du chanvre ne me quitte plus, j’ai réussi à prendre le foulard en otage et il n’est jamais très loin de moi.


Peut-être ferions-nous une rencontre plus organisée lui et moi pour me laisser l’opportunité d’en faire un bel article ! En tout cas, j’en serais ravie pour ma part !

Répondre à MU Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *